Vingt-huitième
jour :Méthode qu'il faut observer dans la méditation des
Mystères du Rosaire et les fruit que nous devons en tirer
Mon
coeur s'est échauffé au-dedans de moi, dit le Prophète royal, et
le feu s'y allumera dans ma méditation. La méthode générale que
nous, devons suivre dans la méditation des mystères du Rosaire,
nous est prescrite dans ces paroles, en expliquant ce passage du feu
de la charité et de l'Amour de Dieu et du prochain qui s'allumait
dans les entrailles du Saint Prophète par la méditation des choses
célestes. De manière que, dit Saint Cyrille, méditer, c'est comme
frapper avec du fer sur un caillou pour .en faire jaillir du feu:
c'est donc au moyeu de la méditation des mystères et réflexions de
l'entendement, qu'il faut que vous frappiez sans cesse sur le caillou
de votre coeur endurci, jusqu'à ce que vous en tiriez du feu et que
vous l'embrasiez enfin lui-même de l'amour de Dieu, de la Charité
du prochain, et d'un ardent désir de l'humilité, de la
mortification et de toutes les vertus chrétiennes. La méditation ne
doit être qu'un moyen pour exciter dans notre coeur le désir de la
vertu: car la perfection de la vie chrétienne ne consiste point dans
les bonnes pensées ni dans
l'intelligence
des choses saintes; mais elle consiste dans les solides et véritables
vertus, et particulièrement dans les actes que l'on en produit et
qui sont l'accomplissement de toute la perfection; par conséquent
c'est là-dessus que nous devons le plus insister, et c'est à quoi
nous devons principalement nous occuper dans la méditation des
mystères du rosaire.
Le
premier exercice consiste à se représenter le lieu où le fait
qu'on veut méditer s'est passé, comme si réellement on s'y
trouvait. Par exemple, si nous avons à méditer le Crucifiement de
Notre Seigneur sur le Calvaire, nous nous formerons une idée de
toutes les circonstances, telles que les évangélistes nous les ont
décrites, par rapport au lieu, aux personnes, aux actions et aux
paroles. Or, l'utilité de cet exercice consiste en ce que nous
renfermons notre esprit dans l'étendue du sujet que nous méditons,
de peur qu'étant aussi volage qu'il l'est, il ne se répande sur
d'autres sujets. Cet exercice de l'imagination doit être suivi de
celui de l'entendement que nous appelons méditation, et qui n'est
autre chose que l'application aux considérations capables d'élever
notre volonté vers Dieu et de nous affectionner aux Saints Mystères
que nous méditons. C'est en cela que la méditation est fort
différente de l'étude; car la fin de l'étude est la science,
tandis que la fin de la méditation est l'amour de Dieu et la
pratique de la vertu.
Après
avoir donc circonscrit, comme nous venons de le dire, notre esprit
dans l'étendue du sujet que nous voulons méditer, appliquons notre
entendement aux considérations qui en sont la substance et l'exposé;
et si notre esprit trouve assez de lumières et d'utilité dans une
seule de ces considérations, il faut l'y arrêter, imitant les
abeilles qui ne quittent point la fleur à laquelle elles se sont
attachées, tant qu'elles y trouvent du miel à sucer. Mais, si notre
esprit a de la peine à tirer des réflexions de telle considération
et que notre coeur n'y sente pas d'attrait, passons à une autre
considération, sans curiosité toutefois et sans précipitation.
De-là dans certains livres de prières, les mystères sont
simplement indiqués avec une considération et une prière;
dans
d'autres il y a dix considérations (autant que d'Ave Maria)
destinées à donner matière à la méditation des fidèles. Chacun
peut choisir la manière de méditer les mystères qui lui convient
le mieux d'après ses dispositions, sa facilité à méditer. Il en
est de même pour les quelques mots qu'on ajoute à l'Ave Maria pour
se rappeler le mystère qu'on médite; ce rappel peut donner lieu
chaque fois à de nouvelles considérations et à de nouvelles
affections.
C'est,
en effet, par cette vive attention de l'esprit que la méditation
excite en notre volonté tant de bons et saints mouvements, tels que
les suivants: l'amour de Dieu et du prochain, le désir de la gloire
céleste, le zèle du salut des âmes, l'ardeur à imiter la vie de
Jésus-Christ, la compassion, l'admiration, la joie, la confusion de
nos péchés, la confiance en la miséricorde de Dieu et les autres
affections auxquelles l'âme doit s'exercer et dans lesquelles elle
doit s'épancher le plus qu'elle pourra. Il ne faut pourtant pas
s'arrêter tellement à ces affections générales qu'elles fassent
négliger de prendre des résolutions spéciales pour la pratique. De
là aussi, la nécessité d'avoir en vue, dans la méditation de
chaque mystère, une vertu comme suite et fruit de ce Mystère. Ainsi
la première parole de Notre-Seigneur sur la Croix, produira dans
notre âme le désir de l'imiter dans la pratique du pardon et de
l'amour des ennemis; mais cela est peu de chose, si nous ne formons
notre résolution de cette manière: « Eh bien ! je ne m'offenserai
plus de telles et telles paroles fâcheuses de la part
d'un
tel, ni de tel et tel mépris que celui-ci ou celui là fait de moi;
au contraire, je dirai et ferai telle ou telle chose pour adoucir
l'esprit de l'un et pour gagner le coeur de l'autre ». Voilà
véritablement le moyen sûr et infaillible de tirer un grand profit
spirituel de la méditation bien faite des Mystères du Rosaire.
De
même qu'on a dû se préparer à la récitation et à la méditation
du Rosaire, en se mettant en la présence de Dieu et en lui demandant
le secours de ses lumières et de ses inspirations, on doit de même
terminer cette récitation et cette méditation par trois actes qui
demandent beaucoup d'humilité. Le premier est de rendre grâces à
Dieu de la connaissance qu'il nous a donnée de sa Miséricorde, ou
d'une autre de ses perfections, et de le remercier de toutes les
saintes affections et résolutions que sa grâce a excitées et
opérées en nous. Le second est d'offrir à Sa Divine Majesté toute
la gloire qui peut lui revenir de Sa Miséricorde, ou d'une autre de
ses perfections, lui présentant encore toutes nos affections et nos
résolutions, en union des vertus de Jésus-Christ Son Fils et des
mérites de Sa Mort. Le troisième doit être une humble prière par
laquelle nous demandons à Dieu la grâce de participer aux mérites
de Son Fils, l'esprit de Ses Vertus et principalement la fidélité à
nos résolutions, en reconnaissant que l'exécution dépend de Sa
Sainte Bénédiction. Enfin, il est à
conseiller
de prier pour l'Église, nos pasteurs, nos parents, amis et autres
personnes, par l'intercession de Notre-Dame du Rosaire, des Anges et
des Saints et de finir par un Pater et un Ave. Les personnes qui ont
l'habitude de méditer, nous comprendront aisément, et pourront sans
la moindre difficulté mettre en usage cette méthode de réciter et
de méditer le Rosaire; les autres ne doivent pas s'imaginer qu'elle
soit difficile et qu'elle exige beaucoup de temps; en s'y exerçant,
elles apprendront par leur propre expérience, qu'elle est très
facile. Du reste chacun peut suivre celle qui lui plaît, pourvu
qu'elle soit propre à lui faire réciter et méditer le Rosaire avec
fruit.
Résolution
Conservez
ce qui est bon, dit Saint Paul. Si nous avons une bonne manière de
réciter le Rosaire, tenons-nous y en tâchant seulement de le
réciter toujours avec plus de ferveur; si nous reconnaissons que
nous ne méditons pas les Mystères d'une manière convenable et
fructueuse, tâchons de nous pénétrer de l'esprit d'oraison qui est
l'esprit de Dieu et de l'Eglise, afin que nous devenions de fidèles
disciples et de parfaits imitateurs de Jésus et de Marie.
Prière
Tout
don parfait vient de Vous, Seigneur ! nous venons donc Vous demander
instamment la grâce de réciter et de méditer selon l'esprit de
l'Eglise le Saint Rosaire, afin qu'en nous pénétrant des Mystères
qui le composent, nous pratiquions à Votre plus grande Gloire et
pour le Salut de notre âme, les vertus qui en découlent et que
Votre grâce seule peut nous faire pratiquer. Nous l'implorons de
Vous, Seigneur, par l'intercession de Marie, notre Bonne et puissante
Mère. Ainsi soit-il.
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