Quatorzième
jour : La dévotion du Rosaire a été accueillie par le
concours unanime des Fidèles
A
l'époque de l'institution du Rosaire, il y eut un redoublement de
ferveur pour le culte de Marie. Une preuve évidente c'est que, dans
le treizième siècle, les temples et les chapelles en l'honneur de
la Sainte Vierge se multipliaient partout. On assure qu'à
Constantinople on comptait cinquante-neuf églises ou chapelles
érigées en l'honneur de Marie; et à Rome on en comptait cent
soixante-sept, tant l'empressement des fidèles à honorer la mère
de Dieu était prodigieux. Ce redoublement de ferveur produit par
l'institution du rosaire, explique comment il se fait que cette
dévotion est si répandue dans tous les pays, non-seulement parmi
les membres de la confrérie, mais parmi toutes les personnes dévoués
à Marie, que l'on voit dans toutes les conditions comme dans tous
les états, dans les villes, comme dans les bourgs, la plupart des
chrétiens fidèles à ses pratiques. Eh!comment n'attacheraient-ils
pas du prix à une dévotion pour la propagation de laquelle ils
voient partout d'augustes exemples?
D'abord
parmi les souverains Pontifes, depuis l'origine du Rosaire, les uns
ont enrichi d'indulgences cette dévotion; les autres ont fait
inscrire leurs noms dans les registres de la confrérie; tous
récitent avec confiance le Rosaire et le distribuent même à ceux
qu'ils honorent de leur affection ou de leur estime. Boniface VIII,
ayant fait représenter sur le satin les Mystères du Rosaire,
ordonna qu'on les mit, après sa mort, dans son cercueil, comme une
marque de l'estime qu'il faisait de cette dévotion.Les évêques
s'honorent partout, non-seulement de réciter le Rosaire, mais d'en
propager la pratique dans leur propre maison, ainsi que parmi le
Clergé et les fidèles, appuyés sur l'usage transmis par leurs
prédécesseurs et par les plus illustres évêques de la
catholicité: Saint Charles Borromée, Saint François de Sales, etc.
Tous les fondateurs d'Ordres ou de Congrégations des derniers
siècles, ont adopté cette dévotion et l'ont prescrite à leurs
disciples qui se font un
devoir
d'allier cette dévotion avec celles de leur institut, et de la
propager parmi les fidèles. Tous les
missionnaires
apostoliques l'ont préconisée dans leurs prédications. D'ordinaire
ils faisaient réciter dans leurs missions, comme on le fait encore
de nos jours, une partie du Rosaire, attribuant à cette dévotion
toutes les bénédictions que Dieu répandait sur leurs travaux.
Tous
les princes chrétiens, les chefs augustes des Etats de l'Europe, ont
donné l'exemple à leurs peuples en adoptant et en pratiquant cette
dévotion. En Allemagne, l'empereur Charles-Quint regardait le
Rosaire comme une excellente pratique pour obtenir la protection de
Dieu. Il était si fidèle à réciter le rosaire, que, lorsqu'il
l'avait commencé, il ne l'interrompait jamais pour les affaires les
plus importantes de son empire; et quand on venait pour
l'interrompre, il répondait: « Après avoir achevé le Rosaire, je
m'occuperai des affaires de la guerre ». En Portugal, le roi
Alphonse V, disait à ses ministres: « Prions la sainte Vierge, afin
que Son Rosaire soit le guide du gouvernement de mon empire ». En
Espagne, Philippe II, dans les avis qu'il donnait à son fils pour
bien gouverner son royaume, lui disait: « Mon fils, si vous voulez
mettre vos royaumes à l'abri de tous dangers, portez toujours avec
vous le Rosaire ». Dans le duché de Parme et de Plaisance, le duc
don Ferdinand, modèle de piété parmi les confrères du Rosaire,
fit un opuscule sur cette dévotion pour en faciliter
la
pratique à ses sujets. En Bohême, le roi Jean disait, en parlant du
Rosaire: « J'ai mis dans cette dévotion toute confiance pour mon
salut ».
Marie-Thérèse,
d'Autriche, épouse de Louis XIV, fut héritière de la dévotion de
la reine régente; elle suivait comme elle la procession du rosaire,
les premiers dimanches du mois et les fêtes de la Sainte Vierge,
dans tous les lieux où elle se trouvait; et elle s'acquittait
exactement de tons les autres devoirs de la confrérie. Louis XIV,
reçu dès son berceau dans la confrérie, fut toute sa vie fidèle à
celle dévotion, le Père De La Rue rapporte qu'ayant trouvé un jour
ce monarque récitant son Chapelet, composé de fort gros grains, il
lui en témoigna une surprise accompagnée de sentiments
d'édification, à cause de ses nombreuses et importantes
occupations: « Ne soyez pas surpris, lui dit le roi, je me fais
gloire de dire mon chapelet; c'est une pratique que je tiens de la
reine, ma mère; et je serais fâché de manquer un seul jour à m'en
acquitter ». En Angleterre, le roi Jacques II faisait réciter tous
les jours, publiquement et en présence de toute sa cour, une partie
du Rosaire, avec l'explication des mystères.
Nous
pourrions citer encore d'illustres exemples, mais nous devons nous
borner; on les trouvera dans les recueils volumineux où ils sont
consignés. En France, les progrès du Rosaire ont été si rapides
de siècle en siècle, que les églises du Rosaire ne pouvaient
contenir les fidèles, tant l'affluence était considérable. A
Toulouse, surtout, il y eut une époque où le concours immense des
fidèles fut si tumultueux, à cause de la foule, que deux ordres
religieux de cette ville, pour satisfaire la dévotion des peuples,
voulurent introduire un nouveau genre de Rosaire; mais le Saint Siège
refusa de l'approuver. L'Europe s'empressa de se ranger sous
l'étendard du rosaire; on forma des associations dans les villes et
les campagnes. Mais cette dévotion n'a pas été resserrée en
Europe; elle s'est propagée partout, en Afrique, en Amérique et en
Asie, avec une étonnante rapidité, avec un zèle et une édification
qui croissent chaque jour et qui produisent des fruits infinis de
grâce et de sanctification dans tous les lieux où la confrérie est
établie. Il est plusieurs paroisses où il est d'usage
d'inscrire
dans la Confrérie du Rosaire les enfants le jour de leur première
communion, tellement l'on
considère
cette association comme étant à la portée de tous, et l'on juge
naturel pour tout chrétien d'en faire partie, flous ne pouvons
qu'approuver cet usage, pourvu qu'on ait soin d'expliquer aux enfants
et au peuple quel est l'esprit de cette confrérie, quelles en sont
les obligations et les faveurs; points que nous aurons lieu de
développer les jours suivants; mais auparavant nous verrons demain
ce qu'on entend par confrérie en général, et par Confrérie du
Rosaire en particulier.
Résolution
Plus
une dévotion est générale et populaire, et plus elle doit nous
paraître sainte et divine: ce principe d'un docteur de l'Eglise
s'applique sans nul doute à la dévotion du rosaire que nous
apprenons mieux à connaître chaque jour comme étant populaire et
universelle. Prenons donc aujourd'hui la résolution de la pratiquer,
ou, si nous la pratiquons déjà, celle de ne jamais la négliger,
mais de nous en acquitter avec un vif désir d'imiter tous les
fidèles enfants de l'Eglise qui se sont toujours fait un devoir de
payer ce tribut d'hommages et d'invocation à la Mère de
Miséricorde.
Prière
Il
est passé en proverbe, Seigneur, que la voix du peuple est Votre
propre voix; j'en reconnais la vérité relativement à la belle, à
la Sainte dévotion du Rosaire. Faites donc, Dieu de bonté, que je
m'unisse chaque jour aux nombreux fidèles qui, en méditant les
principaux Mystères de la Religion, implorent l'assistance
toute-puissante de Marie; je Vous demande la grâce de ne faire avec
eux qu'un coeur et qu'une âme pour Vous louer, Vous bénir, Vous
remercier et Vous glorifier par Marie, que Votre Divin Fils nous a
donnée pour Mère du haut de Sa Croix où Il mourait pour notre
rédemption. Ainsi soit-il.
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